Premier Moyen Âge
Le territoire et les hommes
La chute de l’Empire romain et les grandes invasions pendant lesquelles le peuple franc pénètre en Gaule (entre 430 et 450) marquent le début du Haut (ou premier) Moyen Âge. Les Francs, dès lors, domineront le territoire donnant naissance aux dynasties mérovingienne (Ve au VIIe siècle) et carolingienne (VIIe au IXe siècle).
Les terres les moins fertiles sont abandonnées et un phénomène de concentration foncière se développe. Le sud des Yvelines se dépeuple laissant la place à de grandes forêts dont celle de Rambouillet constitue un vestige. Contrairement à la légende communément admise, celle-ci n’est donc pas le vestige de la forêt gauloise mythique des Carnutes.
Presque la moitié des sites d’habitation du premier Moyen Âge ont une origine antique ce qui montre une très forte continuité dans l’implantation de la population. C’est le cas des villes de Septeuil, Epône, Houdan, Jouars-Pontchartrain, Maule, Meulan, Les Mureaux ou Poissy, qui sont très importantes durant cette période.
Le commerce terrestre et fluvial reste dynamique. Les textes citent des commerçants d’outre-Manche qui remontent les voies navigables comme la Seine et l’Oise. Ports et péages sont nombreux.
Production agricole et artisanale
Les systèmes agraires changent, les villae disparaissent au profit d’autres exploitations. De grands domaines agricoles appartenant à des seigneurs laïcs ou ecclésiastiques se développent.
Pour exemple, le domaine de Saint-Germain-des-Prés, à Paris, décrit vers 820 par le polyptyque de l’abbé Irminon (registre sur lequel l’abbaye note les terres dont elle est propriétaire), comprend de nombreuses terres situées dans les Yvelines.
Les paysans y exploitent une tenure* en échange de redevances et de services au seigneur. Des paysans indépendants existent aussi. Ils exploitent de petites surfaces de terre appelées alleux.
Les artisans du métal maîtrisent particulièrement bien la réalisation d’accessoires vestimentaires : plaques-boucles de ceinture, fibules…
La majorité des plaques-boucles retrouvées lors de fouilles, en bronze et fer, damasquinées d'argent, présente des décors classiques tels que des entrelacs. Certaines sont ornées de décors plus rares tels que des personnages ou des animaux. Une plaque-boucle décorée du nom de son propriétaire a été retrouvée à Poissy. Les fibules, quant à elles, peuvent prendre différentes formes comme celle d’oiseaux ou encore d’animaux fantastiques.
Ces orfèvres de talent fabriquent également toutes sortes de bijoux incrustés de grenat et de pâte de verre colorée : perles, boucles d’oreilles, bagues, bracelets…
La production potière est différente de celle de l’époque gallo-romaine. A Epône et aux Mureaux, des récipients lisses ou granuleux et parfois peints, ont été mis au jour. Ils sont souvent découverts en contexte funéraire, déposés en offrande aux pieds des défunts.
Architecture et habitat
L’habitat en bois et en terre, un peu délaissé à l’époque gallo-romaine, revient en force. L'organisation des habitations reste dispersée sur le territoire.
Aux Mureaux, sur les bords de Seine, des fouilles ont révélé un habitat rural dès le Ve et VIe siècle, puis un accroissement de la population vers une agglomération du VIIe au XIe siècle.
Celle-ci comportait des maisons sur poteaux et parfois sur solins de pierre, un silo à grains, des fours à pain et des vestiges de cabanes semi-enterrées, souvent à vocation artisanales.
Des fossés de drainage et des voies aménagées organisaient ainsi l’espace de l'agglomération.
À Chavenay, un bâtiment agricole a été étudié par le Service archéologique des Yvelines. Le bâtiment possède six poteaux porteurs offrant un espace d’une dizaine de mètres carrés. sa fonction n'a pas pu être précisée. La céramique mise au jour a permis de dater cet édifice du VIIe ou VIIIe siècle.
Vie spirituelle
C'est à cette période que le christianisme se développe lentement. Des églises et des mausolées sont construits, comme le mentionnent des textes et le révèlent les fouilles.
Le premier monument chrétien connu se situe à Jouars-Pontchartrain, dans les Yvelines. Les restes d’une église ont été découverts en 1996 à l’occasion d’une fouille préventive, lors de la construction de la RN12. Cette église, datée de la fin du Ve siècle, de 23 m de long sur 16,50 de large, est de plan rectangulaire. La structure de l’édifice s’appuyait sur des colonnes dont on a retrouvé les bases et les fûts. Les murs devaient être ouverts de fenêtres vitrées et l’intérieur décoré de sculptures.
A Rosny-sur-seine, une église cruciforme de la fin de l’époque mérovingienne, surmontant une nécropole de la même période a été mise au jour.
A l’époque carolingienne, on connaît d’avantage d’édifices religieux. Le fameux "polyptyque d’Irminon" atteste l’existence en 829 de deux églises dans la ville d’Orgerus, d’une église à la Celle-Saint-Cloud, d'une chapelle à Guerville et d'un monastère à Plaisir au VIIIe siècle...
Dans l’église Saint-Nicolas de Saint-Arnoult-en-Yvelines, dont la partie la plus ancienne est antérieure au XIe siècle, les croyants viennent se recueillir sur les reliques de Saint-Arnoult, situées à l’emplacement de la crypte actuelle.
Une opération d'archéologie préventive récente a permis de révéler l'existence d'un édifice carolingien fondateur de l'église Saint-Martin de Verneuil-sur-Seine (IXe siècle).
Les espaces funéraires
Certains cimetières d’époque antique continuent d’être utilisés, mais de nouvelles et vastes nécropoles apparaissent avec les Mérovingiens. On y enterre les gens habillés et l’on dépose des objets dans les tombes, pratique païenne tolérée par le christianisme des débuts.
Les défunts sont déposés dans des sarcophages de pierre ou de plâtre, dans des cercueils ou encore directement dans le sol. Les tombes s’orientent presque toujours de façon à ce que la tête du défunt soit à l’ouest, les pieds vers l’est et généralement en position allongée sur le dos.
Les nécropoles mérovingiennes sont plus nombreuses en vallée de Seine ce qui traduit probablement une plus forte occupation du secteur. Les plus importantes, Andrésy, Maule, Vicq, Epône, Septeuil et Gaillon-sur-Moncient ont fait l’objet de fouilles récentes. Ces nécropoles ont livré de nombreux objets : céramiques, armes, outils, plaque-boucles de ceintures, bijoux, fibules…
Les nécropoles de Gaillon-sur-Moncient, Andrésy, Maule, Epône, Guitrancourt et Septeuil comportent aussi des stèles funéraires gravées. A Gaillon-sur-Moncient, certaines sont décorées de croix grecques ou de chevrons.